mardi 13 mars 2012

DESERT


Ce samedi Jean Giraud nous a quitté. Le desert était son territoire; immensité plane et, au milieu, l'Homme; sidéré par sa propre verticalité. J.G. Ballard prétendait que "les déserts recèlent une magie particulière, parce qu'ils ont épuisé leur futur et sont par conséquent libérés du temps." Moebius est désormais libéré du temps et s'il a choisi le désert pour raconter notre singulière condition d'"être vertical", il y a fort à parier qu'il ne demeurera pas longtemps allongé. Tel Arzak, l'arpenteur continue de fouler des territoires sans coordonnées.

1 commentaire:

  1. Et si le symbole de la verticalité chez l'Homme était la Porte. Antithèse du désert... une porte est un obstacle ; une frontière ; elle est également génératrice d'une singularité, d'un événement. Le dehors, le dedans ; l'avant, l'après. La porte permet d'inscrire un temps et un espace et donc une narration...
    L'Homme dans le désert porte en lui ces 2 dimensions. Il détient en outre son histoire individuel avec son éducation, ses valeurs mais aussi celle de l'évolution de son espèce qui en quelques millions d'années est passée de la stature d'être rampant à celle d'homme prédateur/debout/vertical.
    Pour que l'histoire se poursuive, pour que l'évolution continue, l'Homme dans le désert, chargé d'Histoire(s) n'a pas d'autres solutions que d'errer afin de ne pas être assimilé à son environnement. Plus encore, l'Homme doit franchir la porte de sa verticalité en se confrontant à sa condition. L'Homme est-il bon ? Question absurde quand on est seul dans le désert. Passée la Porte la réponse ne peut plus être la même. Dans la logique de l'évolution de l'espèce, Moebius imagine que des prédateurs carnivores pourraient ne pas trouver l'Homme à leur goût. Néanmoins cet homme, fruit de son évolution et de son éducation pourrait tout à fait être considéré comme moralement "bon". Ambivalence de la réponse qui ne semble être qu'un faire valoir à sa condition profonde d'être humain : il est incroyablement seul. Tout le reste n'est que "parures". Etre seul à poil ou seul sapé en Rambo...
    Un feu d'indien dans Blueberry qui abolit l'espace ou le temps qui se dilate dans Arzach ?
    Un homme se sachant gravement malade ou un artiste achevant sa carrière là où il l'avait commencée...

    « On peut très bien imaginer une histoire en forme d'éléphant, de champ de blé, ou de flamme d'allumette soufrée »
    Mœbius, éditorial de Métal Hurlant no 4, 1975

    On peut très bien imaginer une histoire de foule absente, de désert, de silence assourdissant et voir l'Homme dans le trait du magicien.

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